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Marcher plus pour produire plus.
Marcher pour se rendre quelque part. Marcher vite, pour ne pas arriver en retard, pour ne pas perdre de temps. Marcher dans le bruit de la ville. Marcher pour ne pas rester immobile.


J’imagine des protocoles de création dans lesquels mon corps en mouvement devient le moteur de systèmes de production.
Je me questionne sur les notions de productivité et de rentabilité qui sont au coeur de notre société et qui cadencent notre quotidien. C’est cette frontière de plus en plus floue entre le monde du travail et celui de la vie privée que j’interroge.
A travers la répétition de gestes, les contraintes que je m’impose, je mets en place des systèmes de captation du réel, qui, absurdes par la nature même de leur finalité, tentent de retenir et de représenter ce qui ne peut que s’échapper.

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Côme Lequin

Une main accompagne les moindres reliefs de la ville. 
Jour après jour, la répétition des gestes semble chercher à épuiser le corps.
Des protocoles donnent du sens aux instants volés sur le réel.

 

Héritier des pratiques conceptuelles telles qu’adoptées par On Kawara, Stanley Brown ou plus proche de nous, Tim Knowles, Côme Lequin imagine des rituels dans lesquels se croisent notamment récolte, performance et dessin. Il est de ces artistes marcheurs comme Francis Alÿs ou Jean-Christophe Norman.

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Côme Lequin fabrique des éléments entre prothèse et outil permettant à ses déambulations de produire de nouvelles formes. Au hasard des échappées urbaines, les lignes se superposent, se perdent. Au fil des jours, les pages s’additionnent et deviennent des motifs qui envahissent l’espace d’exposition.
Dans ses performances, on ressent avec force l’importance des bribes textuelles des habitants de la ville. À leur tour, ces traces vont nourrir le travail de l’artiste. Au croisement de la figure du poète et de l’arpenteur, Côme Lequin révèle de manière filaire les méandres des villes, les gens qui les habitent, les topologies qui les soutiennent.

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Christophe Veys
Directeur du Musée / Centre de la Gravure et de l’Image imprimée, La Louvière (BE)
 

Côme Lequin (Vannes, 1989) vit et travaille à Bruxelles qu’il envisage comme un atelier géant. Dans sa pratique, il met en place des protocoles de création qu’il éprouve la plupart du temps dans la ville et qui donnent naissance à des œuvres entre arts plastiques et performances. La série de gravures La Peau de l'ours illustre parfaitement sa démarche expérimentale, une technique qu’il réinvente en se servant du seul mouvement de son corps comme outil d’impression. Car Côme utilise des semelles en métal comme matrices de ses gravures portant la trace de ses trajets quotidiens, notamment entre son domicile et son atelier. Il se sert ainsi de ses trajets fonctionnels pour réaliser ses créations, questionnant le rapport entre art et productivité. « Marcher pour produire plus. Marcher pour se rendre quelque part. Marcher vite, pour ne pas arriver en retard » raconte l’artiste. C’est aussi « cette frontière de plus en plus floue entre le monde du travail et celui de la vie privée que j’interroge » précise-t-il. Poussant le principe plus loin encore, il répertorie, depuis plusieurs années, tous ses déplacements tel un historien de l’insignifiant.

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Côme joue de l’absurdité de ses protocoles, dans une démarche quasiment surréaliste rappelant un Marcel Broodthaers. Récoltés pendant le premier confinement, les 13 contenants hermétiques d’Aires de Côme s’inscrivent dans le même registre de l’absurde. Les échantillons d’air « sous covid 19 » capturés par l’artiste et ses proches sont comme une archive vivante d’une période aussi étrange qu’inquiétante de notre histoire. Comme tout ce qu’entreprend l’artiste, ils répondent à une soif du subversif dans un monde où est contrôlé, banalisé, rationnalisé.

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Laura Neve
Directrice artistique de la fondation Carrefour des arts et historienne de l'art (BE)

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